Pour un CDI comme pour du management de transition, les recruteurs privilégient souvent des profils juniors et moins expérimentés. Le monde juridique n’est pas épargné par cette tendance de fond, qui ne repose pourtant sur aucune raison tangible… et serait même plutôt paradoxale. Le point de vue d’Arnaud Desclèves, directeur associé du cabinet de management de transition juridique Desclèves & Associés.
Le jeune talent : entre mythe et réalité
« Vous n’avez pas le même en plus jeune ? » Les équipes de Desclèves & Associés ne comptent plus le nombre de fois où un client leur a posé cette question, après la consultation d’une short-list. Si la situation peut prêter à sourire, elle n’en révèle pas moins une tendance de fond qui interroge. Car le constat est sans appel : un certain jeunisme touche les recruteurs au sein des directions juridiques. Avec à la clef une petite contradiction…
Eux-mêmes seniors et expérimentés semblent pourtant estimer que, pour un poste dans leur équipe, entre 2 CV, mieux vaut choisir le moins expérimenté. Alors, pourquoi ce parti pris ?
La première raison invoquée tient à la culture d’entreprise. Les recruteurs considèrent qu’un profil plus senior sera moins agile, moins à l’aise sur les questions informatiques, moins ouvert à l’innovation, moins enclin à surveiller les dernières évolutions juridiques et réglementaires… Autre cliché : il connaîtrait moins les pratiques récentes, les outils et les postures du moment. Évidemment, il ne s’agit que d’idées reçues. Tout tient à la personnalité du juriste. Et l’immense majorité d’entre eux ne répond pas à ce schéma.
L’autre motif est souvent lié à l’équipe. « Il n’arrivera pas à s’intégrer car il sera le plus âgé » fait partie des phrases qui reviennent (trop) souvent. Pour ma part, je trouve étonnant de penser que seules des personnes du même âge pourraient constituer une équipe qui fonctionne !
Cette tendance au jeunisme est d’autant plus surprenante dans le cadre du management de transition juridique. Les clients viennent justement chercher des compétences bien définies, qui répondent à une demande très précise. La réponse à leur problématique se trouve bien souvent auprès de profils seniors expérimentés ! Balayons d’entrée le frein que pourrait représenter le coût : plus les carrières avancent, plus la courbe de rémunération réduit sa progression, avec un tassement à partir d’un certain âge et niveau d’expertise. Au final, la différence de prix est souvent marginale.
Pourquoi se priver des vrais talents ?
Pourtant, de nombreux clients se privent d’une expérience solide en cherchant un profil plus jeune. Combien d’offres d’emploi sont publiées avec la mention « 7-8 ans d’expérience » ? Certes, mais que deviennent les profils qui disposent d’un bagage plus conséquent ? Doivent-ils se reconvertir, devenir consultant ou vivre de leur rente ?
Plus sérieusement, il est ironique de constater que les recruteurs sont eux-mêmes plus âgés et se trouvent à un stade de leur carrière où les mêmes arguments pourraient leur être opposés… Il y a du Kafka dans cette situation.
Recruter un profil senior, c’est du bon sens
Mon message ? Faites confiance aux profils seniors ! Avec une carrière riche en différents postes, ils disposent aussi d’une meilleure adaptabilité et font généralement preuve d’un engagement sans faille. Et là aussi, c’est l’expérience qui parle… »